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Photo du rédacteurMarilou Lévesque

Le deuil de la maternité idéalisée



La maternité telle qu’imaginée

La maternité idéalisée, c’est l’image qu’on se construit lorsqu’on se projette dans un futur pas si lointain. C’est tout ces petits moments et ces petits détails que tu imagines et que tu chéris quand tu penses au moment qui vont suivre la naissance de ta croquette.

Mais tu sais, la transition vers la maternité est tout aussi imprévisible que l’accouchement. Une fois que ce petit être pointe le bout de son nez, c’est lui qui gère.

Les horaires de tes journées seront planifiées en fonction de ses besoins, ses boires et ses siestes. Tu peux imaginer que se sera facile, mais personne ne peut prévoir à quel point le quotidien peut être bouleversé de soudainement se retrouver dans une routine qui est divisé au quart de tour… Vivre le jour de la marmotte, c’est pas pour tout le monde!

Il faut dire aussi que bien que tu as un certain contrôle sur des facteurs internes, certains facteurs tel que la santé de ton bébé, son tempérament (BABI par exemple), la rapidité du lien d’attachement, etc. sont incontrôlables et imprévisibles. La dynamique familiale sera bouleversée et si ce n’est pas le premier bébé, les autres enfants peuvent être en réaction et avoir des comportements plus difficiles à gérer. Tu peux également toi-même ressentir une culpabilité à être moins présentes pour eux ou encore de leur imposer des changements familiaux alors qu’eux n’ont rien demandé.


 


La fatigue

La fatigue… est-ce qu’on peut en parler de la fatigue? Dès le petit + on l’entend encore et encore, à quelle point on vit de la fatigue en devenant parent. Mais c’est difficile de mesurer les impacts qui peuvent être entraînés par la fatigue. Être fatigué; fatigué de cette grande fatigue associée à l’arrivée d’un nouveau-né, fatigué de ces réveils intermittents et de ce petit être qui a des besoins constants, jour et nuit, c’est plus que seulement une sensation physiologique. Les impacts psychologiques de cette fatigue peuvent devenir envahissants et avoir des conséquences à divers niveaux et dans diverses sphères de ta vie. Si la fatigue que tu vis entraîne une diminution de ta patience, une irritabilité, un impact sur ta capacité à communiquer, une baisse de libido, des oublis fréquents, etc… Tu es normales, mais ça en est pas moins difficile à accepter et à s’adapter.



 


Et moi dans tout ça?

Et toi dans tout ça? Tu es en grande transition vers la matrescence.

Matrescence: Contraction des mots maternité et adolescence, la matrescence décrit la période de transition vers la naissance d’un parent. Elle est caractérisée par la crise identitaire qui est entraînée par les nombreux changements physiques, psychologiques, hormonaux et sociaux. (Marilou Lévesque, 2023)

La matrescence c’est une transition énorme que l’on subit dans un période de vie qui est déjà remplie de bouleversements. Se sont des changements qui entraînent de nombreuses inquiétudes, remises en questions, réflexions et repriorisations. Ces grandes réflexion peuvent générer des prises de consciences confrontantes en lien avec tes propres expériences, ton éducation, tes rapports familiaux ou encore ta relation conjugale.

De plus, alors que tu as toujours été le centre de ton univers, que tes besoins ont toujours été mis de l’avant et répondu en priorité, la naissance de cette petite croquette, ce petit être totalement dépendant de toi, demande de toi de le prioriser. Il nécessite de faire passer ses besoins avant les tiens, allant même parfois jusqu’à les oublier tes propres et certains parents iront même jusqu’à perdre l’essence même de qui ils sont au profit de leur rôle de parent qui prend désormais toute l’espace. Passer en deuxième ça peut être difficile à vivre et à accepter, c’est non-négligeable comme adaptation, alors en venir à se perdre dans la parentalité c’est littéralement se perdre soi-même.



 


Et mon couple?

Petite parenthèse pour te parler de ton couple à travers ce raz-de-marée de bouleversements. Pour beaucoup, le couple est mis à rude épreuve dans les deux premières années de vie des enfants et de nombreuses séparations surviennent. En étant appeler à se redécouvrir dans la parentalité, on apprend également à redécouvrir notre partenaire et à s’adapter non seulement aux changements qui s’opèrent en nous, mais à ceux qui s’opèrent dans l’être aimé. Il arrive parfois de découvrir des aspects que l’on ne connaissait pas, qu’il faut apprendre à accepter. Il arrive également que le partenaire ne joue pas le rôle parental tel qu’on l’espérait ou qu’il n’adopte pas le comportement, l’approche et les interactions imaginées. Cela demande de l’adaptation, de la communication et de la compréhension… caractéristiques qui peuvent être difficiles à mettre en place à travers tous les chamboulements et la fatigue de la période post-natale.

La maman et le papa ne perçoivent pas la parentalité de la même façon. Souvent, la maman va former une dyade et développer une relation très forte, quasi-fusionnelle avec son enfant et le papa sera maintenu en parallèle à cette relation. Le père quant à lui a besoin de davantage de temps pour s’adapter et créer un lien fort avec le bébé, il forme une dyade avec la mère et c’est plutôt le bébé qui doit s’intégrer. Cette différence de perception peut créer des insatisfactions dans le couple, le papa se sentant mis de côté et la maman ayant l’impression que le papa n’accorde pas assez d’amour et d’attention au bébé.

Afin de former une équipe parentale solide et forte, il est important de préserver le couple et de maintenir cette flamme. Il n’est toutefois pas aisé de se consacrer du temps de qualité dans la folie du quotidien et réalistement, avec la fatigue et la charge mentale, le couple est souvent dans les premières sphères à être éliminé. Cette coupure est vécue aisément par le partenaire qui effectue la coupure, mais pour l’autre conjoint, ça peut être davantage difficile à avaler.

Il est à noté que la dissonance qui peut survenir au niveau des valeurs et des méthodes éducatives peut également être à l’origine de tension dans le couple.

N’hésitez pas à vous réserver des moments, même s’ils sont courts afin de développer votre connexion intellectuel et raviver votre complicité. Prendre du temps individuel est très important, mais le temps de couple l’est tout autant, car avant d’être parent, vous avez d’abord été des amoureux et cette relation se doit d’être préservée.


 


Le deuil

Lorsque l’on est confronté à la différence entre la réalité vécue et celle que l’on avait imaginée, on peut se retrouver dans un processus de deuil. Deuil du congé parental idéal, deuil du lien souhaité avec notre nouveau-né, deuil du parent que l’on aurait souhaité être, deuil de l’implication de l’entourage ou de l’autre parent tel qu’imaginé. Le deuil n’est pas seulement associé à la mort, il peut également s’agir de la perte de quelque chose, que se soit un événement vécu ou projeté, la perte n’en est pas moins réelle. Bien souvent ce deuil est issu de désir conscient que l’on ne parvient pas à concrétiser, mais également de souhait inconscient dont l’on prend conscience seulement une fois que nous y sommes confrontés.


 


Vivre son post-natal

Devenir parent demande une grande capacité d’adaptation. Nous vivons dans une société où tout est calculé et prévu, alors que la parentalité demande une grande dose de lâcher prise et de laisser aller.

L’état mental du parent peut avoir un grand impact sur la qualité de la période post-natale. Par exemple l’anxiété post-partum peut généré des pensées intrusives ou du mom rage, la dépression post-partum ou encore un stress post-traumatique peut entraîné une apathie, une irritabilité, des difficultés d’attachement ou à s’occuper de son enfant. Il est important de reconnaître les signes et de ne pas hésiter à aller chercher de l’aide professionnelle si tu en ressens le besoin. Il est pertinent de nommer que l’état physique, particulièrement de la mère, a une grande place à jouer dans le post-natal. La récupération suite à l’accouchement (récupération totale qui peut prendre 18 à 24 mois!!), les maux physiques qui peuvent découler de blessures lors de l’accouchement ou de la grossesse, la fatigue, les difficultés avec l’allaitement sont des éléments hors de notre contrôle qui auront un impact sur la transition à la vie parentale. Malheureusement, vivre avec des difficultés au niveau de l’état mental ou physique peut entraîner de la culpabilité du fait d’avoir le sentiment d’avoir manqué des moments importants ou tout simplement de ne pas avoir été ‘’assez’’.


 


Devenir parent en 2023…

À l’ère des réseaux sociaux, la maternité est tellement idéalisée et les aspects négatifs et difficiles de la parentalité sont peu, pour ne pas dire pas véhiculé. Il n’est donc pas rare que les parents se sentent surpris ou encore désarçonnés par un ou plusieurs des facteurs nommés dans ce texte tel que l’augmentation de la charge mentale, l’adaptation à la routine, la ré appropriation de son corps, la guérison physique et mentale, les difficultés d’allaitement, etc.

Dans notre société actuelle, devenir mère est une énorme transition et un chamboulement inévitable (pour le papa aussi!) Rares sont celles qui sont réellement prêtes à faire face à la pression d’incarner la mère parfaite que la société nous reflète que l’on doit être. Indirectement, cette attente de la mère parfaite entraîne une stigmatisation et rend tabous les difficultés et les déceptions qui peuvent être rencontrées dans cette grande expérience de vie. Souvent les mère (parfois les père aussi) vont ressentir que les émotions vécues ne sont pas légitimes, considérant que l’image répandue est que la maternité devrait ‘’tellement être un rôle rempli de dévouement, d’amour, d’arc-en-ciel de de cacas papillons’’, mais c’est pas ça la réalité… La parentalité, c’est très beau, mais il faut se l’avouer, c’est aussi parfois très laid! On en apprend sur soi et on apprend à se redécouvrir un peu plus chaque jour dans ce nouveau rôle.


 


Pour toi, maman qui veut allaiter

Pour certaines maman, l’allaitement c’est tout simplement un ‘’plug and play’’, c’est facile et ça se fait seul. Pour d’autres femme, l’allaitement demande beaucoup de travail et une bonne dose de persévérance. Cet acte qui semble si naturel demande de l’apprentissage et de l’adaptation. Pour certaines femmes, malgré toute l’implication et la bonne volonté, l’abandon sera la solution nécessaire. Cet abandon peut être vécu comme un échec ainsi qu’un deuil, et ça c’est tellement valide!

Il peut être très souffrant de se faire dire des phrases toute faites telle que ‘’ton bébé est nourri c’est tout ce qui compte’’, ‘’du lait c’est du lait peu importe d’où il vient’’, etc, qui bien qu’elle se veuillent bienveillantes, sont surtout maladroites et invalidantes. Aussi, suggérer à une maman qui travaille fort pour son allaitement de donner un biberon, ça peut être extrêmement difficile à accueillir, même si c’est nommer dans le but d’aider, car au fond cette maman, elle le sait que c’est une option de donner le biberon et se serait mentir de dire qu’elle n’y songe pas parfois, alors plutôt que de lui proposer la ‘’solution facile’’ soutien là dans ses conviction et aide là à rester forte à travers les difficultés!

Alors maman si tu veux allaiter, allaites, donne tout ce que tu as et tente ta chance. Si jamais tu arrives au bout de ton parcours, que tu as l’impression d’avoir tout donné et que tu décides de mettre fin à cette aventure lactée, c’est correct, tu as essayé et tu as agis en accord avec tes valeurs. Et si la fin de cet allaitement t’attriste, t’arrache le coeur et est difficile à digérer, vis tes émotions, tu as le droit, c’est valide de ne pas avoir envie d’accepter un résultat qui ne correspond pas à tes attentes. Soit douce envers toi-même.


 


Pour terminer…

Si tu te reconnais dans ce texte, sache que chaque deuil est unique et est vécu différemment. Chaque expérience est traversée de manière subjective, mais pour toi, le pire deuil possible est fort probablement celui que tu traverses, c’est normal et c’est valide. Rappel-toi que le deuil n’est pas du tout un processus linéaire et qu’il demande du temps. Sache aussi qu’au terme de ce deuil, ta perte ne sera pas oubliée, seulement tu apprendras à l’accepter et aller de l’avant malgré elle, tu en ressortiras plus forte. Ton deuil est valide, cher parent, ne laisse personne te dire le contraire, car c’est ta perception de ce que tu as vécu qui en est l’origine et personne ne peut juger cela.


Je te souhaite douceur et bienveillance pour t’accompagner dans cette grosse transition qui caractérise la plus belle aventure de ta vie, celle de la parentalité!


Marilou Lévesque, T.S.

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